8 mars 2019 Journée internationale de la femme

Journée de la femme Burkina FasoDepuis 1984, la journée de la femme au Burkina Faso est particulière. Avec ce jour férié et chômé,  Thomas Sankara à sans doute été le plus féministe des présidents africains.   Quelle est la situation des femmes au Burkina Faso en 2018 ? Des progrès spectaculaires ont été accomplis notamment dans la lutte contre l’excision. Mais le chantier reste considérable: Education, violences, avortement, travail, droit de la famille. La volonté politique est affichée, la société a beaucoup changé et continuera mais à quel rythme ? 

Faire de la journée de la femme un symbole:

Quand Thomas Sankara fait du 8 mars un jour férié, c’est pour que cette journée internationale du droit des femmes donne l’occasion aux hommes de se livrer à des tâches ménagères. Ainsi on a pu voir à l’époque des hommes ( pas tous) se rendre au marché pour faire les courses, sous le regard goguenard des femmes. Les commerçantes ont souvent sauté sur l’occasion pour majorer considérablement leurs tarifs, tant ces messieurs étaient dans l’ignorance absolue des prix de produits de base.

Au delà du symbole, le message était clair et a été martelé. La place de la femme dans la société burkinabé se devait d’évoluer. Sans la volonté politique implacable de Sankara au début de son mandat, cette évolution fut impossible. Des nominations de femmes ministres à des postes importants ont changé la donne. Le chantier était ambitieux, la tache immense. Excision, éducation des jeunes filles, monde du travail,violences conjugales, mariages forcés et précoces.

Quelle est la situation aujourd’hui ? Ne rêvons pas, le Burkina Faso est loin de la Suède. Pourtant sur un certain nombre de critères, les choses ont changé radicalement:

Lutte contre l’excision:

Le chantier de la lutte contre l’excision était celui d’une lutte contre une tradition séculaire. Le gouvernement c’est clairement positionné en adoptant des lois répressives dans le milieu des années 1990. Aujourd’hui, le Burkina Faso, comme le Kenya, fait figure de bon élève sur la carte de la lutte contre l’excision en Afrique, même si ce fléau n’est pas totalement éradiqué. Les chiffres sont très encourageants:
Chez les femmes de plus de 45 ans, 90% sont excisées. Chez les 15-20 ans, le chiffre tombe à 45% alors que 15% des moins de 13 ans sont concernées. C’est la plus forte baisse en Afrique de l’ouest, même si les efforts doivent être poursuivis. A côté du travail de prévention, des chirurgiens proposent maintenant des reconstructions. Mais l’actuel projet de clinique parrainée indirectement par Raël suscite une vive polémique.

Éducation des jeunes filles:

Education des filles au BurkinaMême si c’est c’est un levier qui conditionne tout le reste, les freins sont nombreux. Le taux d’alphabétisation au Burkina Faso avoisine les 30%. La jeune fille doit travailler à la maison ou aux champs, avec sa mère, elle est aussi souvent vouée à un mariage précoce, et donc l’utilité même de la scolarité est remise en cause. Le fait que l’école représente la plupart du temps un coût donne le sentiment à la famille que cet investissement sera utilisé ailleurs … ou pas du tout. Malgré des progrès sensibles, le déséquilibre reste important et la parité est encore loin. De plus, la sous représentation des filles augmente lorsque l’on évolue vers le lycée et le supérieur.

Travail des jeunes filles:

Le constat reste dur: de jeunes, très jeunes filles, généralement issues de villages de brousse, sont placées comme domestiques dans des familles plus ou moins aisées des grandes villes. Cette tradition proche de l’esclavage persiste, avec son lot de dégâts collatéraux: maltraitance, viols, absence de suivi sanitaire et éducatif.

Violences faites aux femmes:

Le problème des violences faites aux femmes recouvre un large spectre: mariage forcé, viol, mutilations génitales, coups et blessures, meurtre.
Ces violences sont transverses, que les femmes soient d’origine rurales ou urbaines, riches ou pauvres, aucun milieu n’échappe à ce constat. Une enquête récente à montré que pour plus de deux tiers des répondants, les faits de viol, de mariage forcé, d’excision ne relèvent pas de violences faites aux femmes. Ici comme ailleurs, un énorme travail de fond, éducatif mais aussi législatif reste à conduite.

Mariages forcés:

Le poids des traditions se fait moins sentir qu’autrefois, mais les jeunes filles « promises », ça existe encore en de nombreux endroits du pays.  En effet, le mariage, dans la tradition sert plus à unir deux familles que deux amoureux. Il est donc encore difficile de s’opposer à une partie de la famille, surtout lorsqu’on est une très jeune fille. Témoignage:

Avortement: On estime à 100000 actes par an le nombre d’avortements clandestins réalisés au Burkina Faso. La moitié est pratiquée par des médecins ou auxiliaires médicaux.

Si l’avortement est autorisé au Burkina depuis 1996, il reste encadré et soumis à de contraignantes conditions: Grossesse mettant en danger la vie de la mère, malformation du fœtus, viol ou inceste… Même si l’avortement est autorisé au Burkina depuis 1996, il reste encadré et soumis à de contraignantes conditions: les certificats et entretiens représentent un véritable parcours du combattant pour des femmes. D’où les avortement clandestin, qui sont pourtant pénalement sanctionné. De plus, les certificats et entretiens représentent un véritable parcours du combattant pour des femmes . Si les femmes urbaines et aisées ont facilement recours à des professionnels de santé bien formés, il en va tout autrement avec les avorteuses clandestines traditionnelles. Le Burkina Faso connait  encore une forte proportion de décès ou d’infections graves liées à ces pratiques.

La situation des femmes au Burkina Faso reste donc perfectible, mais les actions conjuguées du monde associatif et du gouvernement ont conduit à de réelles améliorations, en dépit des résistances coutumières.

1 réflexion sur « 8 mars 2019 Journée internationale de la femme »

  1. En contribution à votre paragraphe sur les mutilations sexuelles : plasticienne engagée, j’ai réalisé une oeuvre sur le sujet des mutilations sexuelles intitulée « Infibulation », que j’ai pu présenter à 400 lycéens français pour la Journée des Femmes 2018. Le dialogue fut incroyable avec des élèves qui découvraient cette pratique barbare.
    Quand l’art permet de parler directement des MGF et d’ouvrir le débat.

    A découvrir : https://1011-art.blogspot.fr/p/blog-page.html

    Mais aussi une oeuvre plus pudique intitulée « Noli me tangere » sur l’inviolabilité du corps de la femme : https://1011-art.blogspot.fr/p/noli-me-tangere.html

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